Je n’aime pas les fins. Je n’aime pas dire au revoir. Je n’aime pas finir un plat. Je n’aime pas voir The End d’un film bien, ni voir les derniers mots de la dernière page d’un livre bien. Ce qui me plaît avec un blog, c’est qu’a priori il est sans fin.
Mais à chaque billet, revient encore et encore le même calvaire : finir. Boucler. Mettre un point final. Conclure. Trouver la chute. C’est comme pousser le rocher de Sisyphe, mais en pire.
Ecrire une fin, c’est dur. C’est dur pour plusieurs raisons :
Quand j’écris pour le blog, je fais passer un crash test à mon billet. Est-ce intéressant ? Est-ce que ça peut apporter quelque chose à mes lecteurs : un conseil, une source d’infos, une matière à réflexion, un bon moment ? A-t-on envie de réagir : sourire, grogner ? Ai-je une bonne fin ?
Très souvent, je suis sceptique. Très souvent, la fin me bloque.
Je me suis rendue compte que 99% de mes billets finissaient de la même façon. Soit je dressais une morale pour finir sur le « mot de la fin ». Soit j’optais pour une ouverture digne d’une conclusion de dissert’ de 3ème.
Ces modes d’emploi me créaient des béquilles mentales. Comme un artisan, je répétais les mêmes gestes, la même construction à l’infini. Je posais une gouttière pour faire couler l’eau toujours dans le même sens, et ça faisait flop.
La fin est un passage obligé du storytelling. Un exercice d’équilibriste délicat. Certains écrivains disent qu’on ne choisit pas une fin et que c’est notre récit qui choisit sa fin. J’aime bien cette idée de magie.
En revanche, ce discours de sage Empire céleste ou Légende des sabres volants ne résout pas mon problème : où amener le récit ? Comment le boucler ? Une question aux lecteurs ? Une blague ? Une morale de fin ? Un petit mot qui surprend ? Faut-il finir, seulement ?
J’ai ouvert mes chakras en dressant une typologie des scénarios possibles.
Cette liste est une base. Certaines options sont combinables : comme le twist qui laisse l’histoire en suspend ou l’ouverture qui arrive comme une conclusion attendue…
Il n’y a pas de fin idéale. Celle qui fonctionnerait universellement, dans tous les récits. Le sage céleste a raison. La fin doit découler du récit. Elle doit coller avec tout ce qui s’est dit avant. La fin est situationniste.
Comme toute amatrice de film/série/bouquin, j’aime bien analyser, débattre, anticiper les fins, et j’aime rarement être déçue.
Une bonne fin procure un effet. C’est comme si la voix mélancolique de The Doors résonnait en fond sonore. On est scotché, on a le coeur serré mais on est heureux que ça se finisse.
This is the end, beautiful friend
This is the end, my only friend, the end
Of our elaborate plans, the end
Of everything that stands, the end
No safety or surprise, the end
I’ll never look into your eyes, again
Elle est mémorable mais minimaliste. Elle doit être rapide, sans effusion, efficace, marquante, pas trop trop prévisible, ni trop « Cotillard dans Batman » rapide-gâché. Elle évite la bataille de pop corn ou le jet de tomates, mais elle peut ouvrir des minutes (heures ?) de réflexion. Mais qu’a-t-il voulu dire ?
Est-ce qu’on a besoin de fins prévisibles ou de choses qui nous surprennent ? Ou des deux ? Une fin trop prévisible a le super potentiel d’être une fin ratée. Pourtant les génies du storytelling hollywoodien usent et abusent de la fin « logique ». C’est que ça marche.
Sur un blog, faut-il varier les types de fin ? J’expérimente sans préméditer. En tant lectrice, ça ne me dérange pas que certains blogs conduisent leurs billets de la même façon. Ca plante une tonalité cohérente, un cadre rassurant. Je sais à quoi m’attendre.
Quand il arrive sur la page d’accueil d’un blog, le lecteur commence par la fin (le dernier billet paru). J’ai essayé ça à l’échelle de billets : finir par le début. Mais finalement la fin idéale, ce serait pas comme dans une Histoire sans fin ? La fin surnaturelle qui se remodèlerait en fonction du lecteur qui rentrerait dans le récit et deviendrait acteur ? La fin qui appartiendrait totalement au lecteur ?
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