Vous avez du l’apprendre au journal de 20 heures (ou pas) : c’est la
sécheresse en Californie. Point de pluie à l’horizon. L’alerte rouge est lancée. Tornades dans les Grandes Plaines, inondations dans le Colorado, tempêtes dans le Nord-Est… rien que ces six derniers mois, les USA ont enregistré plusieurs
phénomènes climatiques dévastateurs.
Pour abreuver vos tirades météo à la Evelyne Dhéliat et vos dîners en ville sur relent de « y a plus de saison ma brave dame », nous avons voulu vous apporter notre témoignage en direct de Santa Cruz.
Les extrêmes climatiques aux Etats-Unis
Les Etats-Unis sont tellement vastes qu’on peut trouver des
conditions climatiques complètement opposées. Il y a quelques semaines, la tempête de neige Hercules gelait toute la partie Nord-Est américaine. Certaines villes enregistraient alors des records de froid (jusqu’à – 50°C en température ressentie). En rentrant pour la France, nos copains n’ont pas pu prendre leur correspondance. A Chicago, il faisait tellement froid qu’il a fallu mettre à l’abri… l’ours polaire d’un zoo.
Janvier à l’UCSC : un arbre en fleurs
Pendant ce temps à Santa Cruz (petite ville de la côte Pacifique censée se situer en zone tempérée) :
on se baladait avec lunettes de soleil sur le nez, on était contents. Depuis que nous sommes arrivés en octobre, nous vous en parlions,
il fait beau à Santa Cruz, sans cesse. Nous n’avons eu que trois jours de pluie, ce qui est bien en-dessous des normales saisonnières.
Depuis une bonne semaine, on se croirait carrément au printemps : certains arbres sont en fleurs, les tourterelles chantent et les Californiennes ont ressorti leurs mini-shorts. Mais voilà, le couperet est tombé : c’est la sécheresse en Californie, et les autorités invitent les habitants à
réduire leur consommation d’eau de 20%.
Le climat californien
La Californie s’étale sous des latitudes différentes et bénéficie de climats qui varient : océanique au Nord, méditerranéen au Centre, aride au Sud.
L’hiver, ici, on peut aussi bien faire du tourisme dans les stations de ski enneigées (dans la Sierra Nevada, au Lac Tahoe ou dans le Yosemite par exemple) que dans les déserts (Vallée de la Mort, Désert des Mojaves…).
La côte californienne est sous l’influence d’
El Niño, un phénomène très complexe qui crée des changements de températures dans l’Océan Pacifique et influe sur les conditions climatiques : il peut causer de la pluie, de la sècheresse, voire des tempêtes. Quand La Niña (courant d’eau froide) est en action au large de la côte Pacifique américaine, par exemple, le temps devient plus froid et pluvieux sur la partie Nord, et plus sec sur la partie Sud. Une équipe de scientifiques vient d’annoncer qu’elle prévoit que les phénomènes climatiques extrêmes générés par El Niño vont s’intensifier (cf. article dans
Nature Climate Change). Alors qu’ils se produisaient une fois tous les vingt ans environ, ils devraient dans l’avenir se produire tous les dix ans.
La sécheresse en Californie
Magouille et Trublion, sous le soleil de Californie
La Californie vit l’un de ses pires épisodes de sécheresse depuis 1895. L’Etat s’attend à une longue série d’incendies et à des difficultés agricoles (l’agriculture est une grosse consommatrice d’eau dans cette région qui est l’une des plus productives au monde).
La sécheresse actuelle qui touche la Californie serait causée par un blocage météorologique anormal. Des hautes pressions se sont installées depuis trop longtemps et empêchent toute perturbation pouvant provoquer des pluies. Certains Californiens font la danse de la pluie, mais ça ne marche pas. Le meilleur des scénarios serait maintenant que la saison des pluies s’étende jusqu’à mars.
Dans cet état le plus peuplé des Etats-Unis,
l’eau est une ressource sensible. Cette sécheresse pourrait faire de la rareté de l’eau une réalité. Actuellement, les médias diffusent de bons conseils pour que les citoyens contrôlent leur consommation d’eau. Mais certaines mauvaises habitudes sont ancrées.
Si vous allez au restaurant dans le coin, vous pouvez voir sur les tables des messages de sensibilisation concernant la distribution d’eau. Pourtant, il est très fréquent que les serveurs(ses) continuent de nous apporter un grand verre d’eau, sans même que nous l’ayons demandé. Pas plus tard que la semaine dernière, on voyait une voisine arroser consciencieusement son jardin.
Tensions autour de l’eau ?
Pancarte contre le dessalement à Santa Cruz
Cette sécheresse ravive les tensions californiennes autour de l’eau. Au nord de San Francisco, les habitants de Mendocino ont été placés sous restriction d’eau. Il ne restait plus assez d’eau à la ville pour les cent jours à venir… De quoi remettre sur le tapis une vieille querelle :
les Nord-Californiens montrent du doigt les Sud-Californiens, qui ont une plus forte tendance à gaspiller l’eau (ben oui, même en plein désert, faut arroser les jardins et les golfs).
Tout récemment, dans notre article sur les
films californiens, on évoquait justement les guerres des eaux en Californie (le thème de Chinatown de Roman Polanski). Ces tensions ont été provoquées tout au long du 20ème siècle par les problèmes en approvisionnement d’eau de Los Angeles la grandissante et la goulue. La métropole, qui s’approvisionne jusque dans la rivière du Colorado, continue de s’interroger sur l’avenir de ses ressources en eau : pourront-elles suffire ?
Pour répondre à leurs besoins, les Californiens ont trouvé une
nouvelle source d’eau : l’eau de mer. A Santa Cruz, certains habitants protestent via des pancartes plantées dans leur jardin. Pour eux, le dessalement n’est pas la solution. Car pour dessaler l’eau, il faut utiliser… beaucoup d’énergie. Et ça, c’est encore un autre problème…