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Au DMV (l’administration des permis de conduire)

Aux Etats-Unis, tu sais qu’on va te charrier quand… tu vas au DMV. Les pires légendes urbaines entourent cette administration américaine kafkaïenne. Le DMV, c’est l’administration des véhicules motorisés (Department of Motor Vehicles), celle par laquelle on doit passer pour avoir son permis de conduire et enregistrer sa voiture, etc. Y aller, c’est une aventure longue et douloureuse que les Californiens connaissent bien : en Californie, il faut faire renouveler son permis de conduire tous les 4 ans avant son anniversaire (« happy birthday! »). Quand tu vas au DMV, tu sais qu’il faut poser toute une demi-journée de travail, que tu vas devoir prendre ton mal en patience, et que, pire, des choses peuvent mal se passer. En un an, suite à des problèmes administratifs chaotiques, Trublion a dû aller… 6 fois au DMV. Il était enchanté de devoir y retourner, vendredi, pour… la 7ème fois. Tout récemment, il a perdu son permis de conduire et a dû donc le faire renouveler. Allez, on vous raconte tout ça, pour la petite histoire ?

On s’est levés à 6h30 pour arriver à la première heure, avant l’ouverture. Le bon plan pour que « ça aille plus vite ». Ils sont déjà 20 à attendre. Il y a ceux avec leur litre de café en main, prêts à l’attente. Les autres avec leur dose de patience. L’ouverture, c’est le moment où tout semble possible. Les choses se mettent en place. Les agents ouvrent leurs postes. Une dame passe avec un chariot pour orienter les gens. Les portes s’ouvrent et la file commence à se rétracter. On se dit que ça va aller vite. Ou pas.

Le mieux, c’est de venir en ayant pris un RDV en ligne. Ca permet de couper la file. Nous, on en n’a pas (fallait s’y prendre plusieurs semaines à l’avance). On fait la queue pour obtenir un ticket. Premier agent au guichet, chargé de nous aiguiller :

– Is it true that in France you say ‘four twenty’ to say ‘eighty’?
– What? Euh… yes.
– That’s weird. Why?


On repart refaire la queue avec un ticket et… une énigme à résoudre. On s’assoit sur nos sièges années « quatre vingt ». L’inertie du lieu nous encercle. Tout semble à l’arrêt, les visages, les écrans, l’horloge qui ne tourne plus. Regards blasés dans la file d’attente comme derrière les guichets. Je m’entraîne à faire des tests de vision avec leur alphabet ophtalmo (faut bien optimiser la visite). Cela fait pas 30 minutes que le centre vient d’ouvrir. Les journées sont longues ici, et on le sait : la première fois qu’on y est venus, on a dû y rester 5 heures.

Un père et sa fille viennent pour un RDV. Ils ont pas les bons papiers. Ca ne rigole pas. On leur fait une petite leçon administrative pendant 10 bonnes minutes, et on leur recolle un RDV. Merci d’être passés. Très important : venir avec tout sur soi (et pour les détenteurs de visas qui viennent passer leur permis, ne pas oublier le I-94).

Une femme commence à s’énerver. Le DMV ne retrouve pas trace de ses paiements de je-ne-sais-quoi. « Unbelievable« , elle frappe du poing sur le guichet. L’agent garde son calme. Nous, à 2 mètres, on saute au plafond. Ca fait une heure qu’on attend, on s’est rendormis sur nos chaises. Elle se retourne : « I apologize to all of you guys, but not to them. » Elle est vé-nè-re.

« They’re just doing their jobs« , réplique un mec dans l’audience. Il balade son fils de 2 ans sur une auto en plastique. L’enfant vient passer son permis, qu’il dit. Il fait trois fois la blague, tellement elle est bonne. Ah, on s’amuse.

Un peu plus loin, une petite mamie est toute perdue. Elle vient repasser son permis. On l’aide. Oui, il faut attendre qu’on appelle le numéro qu’on a sur notre ticket. Sur l’écran, là, oui. Chouette nouvelle pour elle – elle va pouvoir expérimenter la grosse nouveauté du centre depuis quelques mois : les ordis ont remplacé les quizz papiers pour passer son code. Malheureusement, l’écran vert devant lequel elle va pouvoir arborer sa mise en plis pour qu’on la prenne en photo, lui, n’a pas changé. Après une à trois heures de folle expérience DMV, les usagers défilent devant avec le sourire englué.

« On embauche ! », clame une affichette. Juste en dessous d’un bocal pour dons avec un gros smiley jaune. Un jeune photographie l’affichette avec son smartphone. Ca sent le poste ironique sur les Internets, ça. Sur Google Images, il y a des compèts de photos de la file d’attente la plus longue au DMV.

On passe. Enfin. Plus d’une heure qu’on attendait. C’est le moment de la victoire. Celle où tout va se jouer. La guichetière est sympa. Elle prend son temps pour nous faire plein de blagues (pendant qu’une bonne cinquantaine de personnes attendent toujours). Faut bien rattraper le temps perdu. On se marre comme des bossus. Jusqu’au moment où je vois son visage se décomposer. « Oh oh« . Je me décompose moi-même. Qu’est-ce qu’ils vont encore nous inventer ? Il y a un imbroglio. Bien décidés à ne pas passer la journée là, on le démêle en 2-2. Elle n’avait pas compris qu’on était des étrangers sous visas (« what? you don’t hear my prononciation?« ) et que le permis de Trublion expire donc à la fin de son visa (pas le mien, allez comprendre…). Tout va bien.

Contre 27 dollars, elle lui réimprime un justificatif de permis de conduire. Quand elle nous le présente, on s’empresse de vérifier scrupuleusement les infos imprimées dessus avant de repartir (date de naissance, nom, prénoms en chaîne, tout ça tout ça). Très important aussi (on nous la fait plus, à nous, après 10 000 histoires d’erreurs dans nos papiers du DMV et des suspicions de présence illégale sur le territoire).

Enfin on repart. Libres, soulagés.
« Oh mais c’est cool, ça nous a pris qu’une heure vingt, en fait. »

Magali

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Magali

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