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Dans le sas du départ

Tout semble à l’arrêt. On est quasi-prêts, fatigués. On est dans le sas du départ : pas encore partis, mais déjà plus trop là. On a vidé entièrement notre appart et rendu les clés. On est gentiment hébergés, en attendant notre grand départ. L’attente est longue. Les préparatifs ont trop duré. Ca nous rend impatients. Les adieux ont commencé, les hugs, les derniers verres, les yeux embrumés et les mentons qui se froissent, les promesses de se revoir. Autre part, ailleurs sur la planète.

On était partis de Paris dans un tourbillon infernal. On quitte Santa Cruz dans une organisation surprenante, limite trop limpide. Le côté ultra-simple et pratique des choses nous manquera certainement. Ici, tout est convenient. Facile de démissionner, facile de quitter son appart, facile de résilier ses contrats, facile de fermer son compte en banque… Les bagages, eux, nous prennent encore la tête. On ne cesse de les peser et re-peser (comment il a pris 5 kilos dans la nuit, celui-là ?).

On a entamé un pélerinage curieux dans Santa Cruz. On dit au revoir aux endroits qu’on a aimés. La sensation est étrange, entre pincement au coeur et excitation de partir. Poser les yeux une dernière fois sur l’océan, plisser les yeux une dernière fois au contact du soleil californien, remarquer toutes ces petites choses qui nous manqueront et faire une liste à la Prévert en se disant qu’il manque forcément quelque chose. Les sandwichs au sourdough, les pickles, les donuts au sirop d’érable, les petites maisons en bois coloré, les IPA, les jardins, les barbecues, l’ambiance insulaire de Santa Cruz, l’humour américain, le sourire de la caissière chez Jacks, les poppies californiens…

J’ai arrêté de prendre des photos. J’essaie de tout graver en mémoire, une dernière fois. On fait le bilan. C’est marrant comment on se souvient avec autant de détails de notre arrivée, de nos impressions, des premiers moments. C’était comme si c’était hier. La boucle est bouclée. On ne cesse de se le dire : on ne réalise pas trop ce qui se passe. Qu’est-ce que l’on ressentira vraiment dans l’avion ?




Le « sas du départ » : syndrome & symptômes

  • la pensée fixe du matin, au réveil. A 6h, les yeux bien écarquillés, le cerveau sous tension et le sommeil qui ne veut pas revenir : « il reste combien de jours ici déjà ? » (moment de vertige).
  • les valises ouvertes sur le plancher depuis des semaines. Tu dis bien qu’il va falloir la fermer, mais tu n’y arrives décidément pas, il doit forcément manquer quelque chose, un dernier souvenir…
  • l’allergie de l’organisation. Ne penser qu’en mode projets, tout prévoir, tout bien penser, au bout d’un moment, c’est épuisant.
  • le petit truc inavouable que tu retrouves en rangeant ton appart’. Pour nous : l’orange de Béné un an et demi plus tard (sans commentaire).
  • l’élaboration de stratégies subtiles. Si je me débarrasse de ce truc-là, ça me fait gagner 10 grammes dans la valise. Allez, poubelle.
  • l’inconfort de l’adieu à l’ami. Dire au revoir, c’est jamais facile. Il faut passer par là, mais on n’a pas trop envie. On fait diversion ou on se promet tout plein de choses pour alléger ce moment pesant.
  • la relecture de la bucket-list pas entièrement cochée. Oh mince, on avait dit qu’on irait voir un film dans un drive-in.
  • le livre d’or des aspirations futures. On a beau essayer de ne pas se faire trop d’idées. Forcément, on se pose des questions, on se promet de faire tout plein de trucs. On rêve un peu.
  • l’envie secrète de se téléporter. Déménager au-dessus d’un océan, ça rend tout de suite tout plus compliqué, et ça donne vraiment vraiment envie de pouvoir se transporter en un claquement de doigts. On en pâlit rien qu’à penser au dernier (long) trajet en avion, avec nos moult bagages.
Magali

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Magali

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