Ah, on y serait bien restés plus longtemps à
Capitol Reef ! Joli, bucolique, calme. Ses falaises multicolores donnaient envie d’y tailler des crayons de couleurs. En plein mois d’août, c’est l’endroit où on a enregistré notre plus long silence contemplatif : « ah on est enfin seuls ». Personne pour crier à côté de nous. L’horizon qui s’aplatit sous nos yeux. Capitol Reef, ça a été le parc de la sérénité. Pourtant, c’était pas gagné : on y a été accueilli très généreusement… par un orage.
Une oasis dans le désert
Capitol Reef est le
petiot de la famille des parcs nationaux de l’Utah. On avait envie d’y faire étape pour découvrir un parc plus intimiste, après
Monument Valley,
Grand Canyon,
Zion et Bryce. La seule chose qu’on ait regretté, c’est de n’y avoir passé qu’un jour ! On est arrivés par un après-midi supra-lourd. Rien qu’à la vue des vergers qui s’étendent au coeur du parc, on a ressenti un peu de fraîcheur et de légéreté. Ces vergers, ils ont été plantés par les Mormons qui ont carrément creusé des systèmes d’irrigation pour conduire l’eau, tout autour de la Fremont River. Les arbres fruitiers qui s’étendent dans la vallée ont fait vivre quelques générations de colons, avant de voir le dernier habitant quitter les lieux, à la fin des années 60. Ca, c’est
Fruita.
Après avoir fait deux fois le tour du camping (le Fruita Campground), on a choisi un emplacement avec vue sur la prairie et les arbres. Calme, chouette, avec une arrivée d’eau juste à côté.
Notez-bien le détail de l’arrivée d’eau. On a déplié la tente en deux-deux, et on est partis gambader – insouciants de la catastrophe qui nous pendait au nez.
Sous l’orage de l’été
On a posé la voiture au
Panorama Point pour marcher jusqu’aux
Goosenecks (littéralement « cous d’oie », des sillons creusés avec le temps par les rivières), puis au
Sunset Point. La chaleur de l’air était toujours aussi oppressante. On n’a croisé aucun marcheur (z’étaient pas fous). Le
Sunset Point nous a offert une vue d’enfer. Gros moment de silence pour essayer de décrypter ce qu’on voyait. Un vrai capharnaüm géologique. Mystérieux, indéchiffrable, antidéluvien. Pour rajouter au surréalisme du tableau, d’énormes nuages étaient apparus. Sous le ciel ardoise, toutes les couleurs se révélaient, l’ocre, le chamois, le vert. Au loin, des éclairs faisaient feu de tout bois. Pas bon signe.
Une goutte est tombée, puis deux, puis trois, puis mille milliards de mille… Une bonne heure après, on pataugeait dans la boue tout autour de la tente. Comprenez : fallait vraiment sauver notre seul abri pour la nuit de la noyade. Entre l’orage et… l’arrivée d’eau qui débordait à côté de notre emplacement, il a manqué de submerger dans les tréfonds du verger. Ce soir-là, on a dîné en région humide. Et heureusement, le soleil du soir a percé. On a pensé aux premiers habitants de cette région désertique impitoyable. La vie ne devait pas être bucolique tous les jours. Paraîtrait que pour détourner les jeunes de l’ennui, les anciens leur ordonnaient de construire des murets de pierre inutiles sur les hauteurs. Démoniaque, hein ?
Bye bye Capitol Reef
Le lendemain, on est repartis sous un ciel lavé de tout soupçon. On a profité encore un peu des vergers, puis on a quitté l’oasis pour s’aventurer sur la Scenic Drive du parc. Finie la solitude : les voitures se suivaient en file indienne. On aurait bien fait une vraie rando, c’était pas l’envie qui manquait, mais le temps. On est repartis en ne donnant que des bons points à ce mini-parc génial : la tranquillité, l’oasis verdoyant, les paysages hauts-en-couleurs, l’immersion dans la vie d’autrefois avec les pétroglyphes des natifs et les vieilles bâtisses de colons. On a ai-mé !