Bordeaux et le fleuve
On dirait une rivière de chocolat sortie de l’usine de Willy Wonka. La Garonne, je veux dire. Sauf que c’est un fleuve, et que pas un Oompa-Loompa ne danse ici. Si vous en voyez un, contactez-moi immédiatement.
Avec ses remous à écume et sa drôle de couleur marron (presque café au lait en fait), elle a la double polarité d’un magnét’ de frigo : à la fois repoussant et attirant. On s’attarde à ses côtés, mais on ne s’en approche pas trop. Des nageurs aguerris font sa traversée chaque année. Personnellement, je ne me risquerai pas à y tremper un doigt de pied. Même si l’eau est chaude, parfois 26 degrés en été !
Une surface trouble, des profondeurs insondables. Des épaves. Des branches charriées. Des tourbillons et des silures terrifiants de 2 mètres de long. On n’aura pas à me le dire deux fois : le fleuve est hostile. J’ai vu passer des aventuriers en paddle cet hiver, fendant les flots, bravant les courants. J’étais partagée entre admiration et sidération.
Une surface trouble, des profondeurs insondables. Des épaves. Des branches charriées. Des tourbillons et des silures terrifiants de 2 mètres de long. On n’aura pas à me le dire deux fois : le fleuve est hostile. J’ai vu passer des aventuriers en paddle cet hiver, fendant les flots, bravant les courants. J’étais partagée entre admiration et sidération.
Au soleil, l’eau prend des reflets moirés, dorés. Vu du ciel, c’est un fil d’or dans le paysage. Mieux : un bandeau Haribo saveur cola.
On l’oublie toujours un peu. Bordeaux n’est pas sur la mer. Mais c’est un port. Le 7ème français. On s’en rappelle quand on regarde du côté de Bassens et ses infrastructures de béton et d’acier. Plusieurs terminaux sont dispatchés le long de l’estuaire et du fleuve, du Verdon au centre-ville.
On s’en rappelle aussi quand on lit l’histoire de Bordeaux. La délicate forme de croissant du fleuve a donné son nom au port de la Lune – tout de même moins poétique quand on repense à la traite des esclaves.
Petite, je croyais que l’eau coulait dans l’autre sens. J’avais scellé cette certitude. J’ai dû voir le mascaret sans le savoir. Les marées faussent le jeu. Mais la Garonne coule bien du pont de Pierre vers le pont d’Aquitaine. Pas l’inverse.
Comme le mascaret, les poissons migrateurs remontent la Garonne : saumons, esturgeons, aloses et lamproies. Les bateaux aussi. Seuls les petits formats peuvent passer le pont de Pierre. Les péniches peuvent rejoindre le Canal de Garonne, lié au Canal du Midi. Les autres s’amarrent dans le port de la Lune.
L’été, des navires de croisière, brillant de mille feux, ronronnant de mille clims, se relayent à la place de l’ancien navire-musée Le Colbert, au niveau des Chartrons. Les grands voiliers y voguent pour les célébrations comme Bordeaux fête le vin.
« vous apercevez toujours, à l’extrémité d’une rue, des agrès, une voile, des mâts » François Mauriac
Les guichets (de péage, puis d’octroi) à chaque extrémité du pont n’existent plus
De la rive droite, quand on plisse les yeux pour apercevoir la place de la Bourse ou les Quinconces, 500 mètres plus loin, on se sent très loin. Au Moyen-Age, la Garonne était appelée la « mer ». C’est vrai que le fleuve héberge des îles. L’île d’Arcins, entre Bègles et Lastresne, et l’île de la Lande, entre Cadaujac et Quinsac.
La face du fleuve a changé. Avec son réaménagement, il est redevenu plus sauvage et plus accessible, en pleine zone urbaine. J’adore les balades comme si on était en ville sans l’être, au parc des Angéliques ou sur les rives d’Arcins. On peut le longer à vélo, à pied, pique-niquer, prendre l’apéro dans une guinguette, comme chez Alriq.
« Le fleuve a créé la ville, sans nul doute. Il l’a nourrie de ses sucs, irriguée de ses sèves. » Michel SuffranUn bout de pont de Pierre, ci-dessus.
Les rives d’Arcins, à gauche.
Au fil de l’eau 👇
Derrière le centre commercial du même nom (qui les font presque oublier), les rives d’Arcins ont des airs de Louisiane. Ambiance marécageuse, pontons en bois, cabanes sur pilotis. Ca me donne envie de passer mes soirées sur un carrelet à jouer de la mandoline.
Le fleuve s’est longtemps caché de la ville. Il se cache encore, derrière des barrières de béton, sa frange de roseaux, sa ligne de carrelets. Mais il est plus facile d’aller à sa conquête.
« Où est la Garonne ? », me demande un monsieur. Je ne suis pas sûre de bien saisir sa question. L’eau boueuse est à cinquante mètres de nous. Il la voit enfin, aux anges. Plein de gens déambulent avec le nez collé sur leur écran de smartphone. Cherchent-ils le fleuve ? Dois-je les aider ?
La Garonne change de couleur en été. Quelqu’un l’avait remarqué ? J’ai appris grâce à ce génial webdocumentaire que l’eau devenait verte à cause des phytoplanctons qui se développent avec la lumière. La balade est immersive. Regarde-le si tu veux flotter sur l’eau (sans danger) 🐟⛵
Tu as une histoire avec le fleuve ? Raconte en commentaire (c’est la boîte en dessous 👇)